Quelle fête !

photo Estelle de Poulpiquet

Mouillés, fatigués, mais le cœur chaud après ces trois journées.

L’Humanité, c’est un beau nom pour un journal, a dit Jaurès (je crois…), mais c’est aussi un beau nom pour une fête ! Pendant ces trois jours, de vendredi à dimanche, des milliers de personnes ont arpenté les allées du parc de La Courneuve, allant de débat en spectacle, de dégustation en découverte culinaire, retrouvant des amis, échangeant avec des inconnus qui deviendront peut-être des amis, trinquant avec des copains, plaisantant au hasard des rencontres, un mot par-ci, un mot par-là, mêlant sourires et gravité selon les débats, riant au soleil retrouvé, se moquant de la pluie, pataugeant dans la boue pour essayer d’arriver au pied de la grande scène applaudir les artistes (visiblement heureux d’être là, malgré le temps trop souvent maussade ces jours-là) et entendre les voix des salariés en lutte, des amis de Charlie, des exilés, des responsables du Parti qu’on dit mort mais qui est toujours là, vivant, solidaire, fraternel.

D’accord, on aimerait que ces journées soient ensoleillées du début à la fin… Même si, au fil des années, les allées ont été goudronnées, lorsque l’orage éclate et que la pluie dégringole, on se dit qu’on aurait dû venir en bottes… certains se retrouvent pieds nus dans la boue, les baskets changent de couleur, il faut bien calculer pour accéder à certains comptoirs de stands, et pour arriver à la grande scène il faut de la patience, de l’équilibre, et ne pas craindre la glissade dans la gadoue !

D’accord, le stand de la Chine me laisse toujours un peu perplexe, avec ses spectacles un peu trop accroche touriste… mais on les admire avec plaisir.

Cette année, parmi les expositions, les extraordinaires masques et sculptures traditionnelles des Bozos du Mali

Il y a tant à voir, à découvrir, à lire, à écouter… chaque année, on fait son programme, aller voir ceci, entendre cela, les expositions, le film, le village du livre avec les rencontres d’auteurs… et chaque année, on repart sans avoir eu le temps (ou la possibilité, certains débats étant « surpeuplés », il est impossible d’entrer dans la salle…) de tout voir tout visiter tout entendre de ce qui était prévu !

Solidarité. Espoir. Fraternité. Oui, ces mots trouvent tout leur sens dans cette fête, ce rassemblement peut-être hétéroclite de jeunes venant écouter « leurs » musiques, de personnes moins jeunes venues retrouver d’autres voix ou d’autres musiques, mais tous découvrant ou partageant des idées, un idéal, et le bonheur simple de la rencontre, jeunes et moins jeunes s’acceptant sans jugement. Écouter. Partager. Fraterniser. Quel beau mot que « l’humanité » !

PS : quatre photos ne sont pas de moi, mais prises dans l’album de la fête 2015, j’ai mis le nom de leur auteur. Et si vous voulez davantage de photos de cette fête, voici un lien : https://www.flickr.com/photos/101309729@N02/

Vous pouvez même m’entendre bafouiller quelques mots sur : http://www.humanite.fr/videos/propos-recueillis-apres-le-grand-meeting-de-la-fete-de-lhumanite-avec-pierre-laurent-583685 (à vous de me retrouver… 😉 )

Je reviens, bientôt…

Je dois avouer que ces derniers jours m’ont plutôt bousculée. Difficile de faire la part des choses entre l’émotion, le voyeurisme des medias (enfin, de certains….), écoeurée par les images non-stop que la télé essayait de nous faire prendre pour de l’information, révoltée contre cette barbarie, désorientée par ces haines, sidérée de voir côte à côte tous ces gouvernants pleurant des larmes de crocodile sur une situation qu’ils ont eux-même créée avec leurs guerres au nom de leur prétendue civilisation et leurs armes vendues à tire-larigot, saturée par ces carrés noirs… bref, j’ai eu du mal, tant physiquement (retour des crampes, de la douleur au genou, petit tournis) que psychologiquement (mal pour ces personnes froidement assassinées, mal pour leurs familles). Il y a eu, fort heureusement, quelques écrits qui me semblaient correspondre à ce que je ressentais et « analysais » (à ma façon basique…), mais ne savais pas exprimer. Parmi eux, celui-ci, du vendredi 16 janvier, le billet de Jean-Emmanuel Ducoin dans l’Humanité, intitulé « Hypocrites » :

« Liberté-Egalité-Fraternité » a connu un éclat retrouvé. Mais il y a un  » mais » que nous ne tairons pas. »

Peuple. Il y a des moments, dans la vie d’une République originelle comme la nôtre, où nous attendons que surgisse de l’obscurité l’éclat d’une lumière, une forme de sursaut qui, en tant que sursaut, veut creuser l’espoir et non les tombes. Les médias dominants et les puissants qui les cooptent ou les financent nous ont tellement répété ces dernières années que la « société française » (de quoi, de qui parle-t-on ?) cherchait son « identité » dans les méandres de ses illusions perdues (lesquelles ?) que beaucoup de citoyens de France se sont égarés en impuissance faute de se remémorer des choses simples et fondamentales. Le « Liberté-égalité-Fraternité » titré en une de l’édition spéciale de l’Humanité, un certain dimanche 11 janvier, n’était pas un rappel à l’ordre ronflant ou inutilement donneur de leçons. Bien au contraire. Ce titre, que notre rédaction ne sort pas tous les quatre matins, signifiait juste que par notre ici-et-maintenant se jouait une partie de notre ici-et-demain. Que la réponse démocratique au surgissement d’un événement hors norme devait être si importante, si puissante, qu’il était impensable de ne pas y jeter toutes ses forces, même celles qui venaient à nous manquer. Ainsi, affirmons-le massivement. Dans les rues de France, cette devise Liberté-égalité-Fraternité a connu un éclat retrouvé, une gravité sincère et peut-être même une réalité sociale et populaire que nous n’imaginions pas d’une telle ampleur. Face à l’histoire, oui, l’histoire, ce gros mot objet de tant de railleries, la société française a été à la hauteur du rendez-vous. Enfin, soyons précis : le peuple a été à la hauteur. Le peuple par millions, le croyez-vous. La sincérité contre le calcul. L’émotion contre l’émotionnel. L’union populaire contre l’union nationale et/ou sacrée. La liberté d’expression contre l’obscurantisme. La politique contre la guerre des civilisations. Non ! il ne s’agit pas là d’une vision idéalisée de ce que nous avons tous vu, mais bien – malgré les complexités et l’analyse des conséquences – de l’apparition d’une France citoyenne que nous n’attendions pas aussi combative à l’heure de défendre l’essentiel.

Citoyens. Mais il y a un « mais » que nous ne tairons pas, puisque les non-dits de cette nature ne guérissent pas les contradictions. L’expression du malaise qui suit n’enlèvera rien à ce qui vient d’être écrit plus haut. Car vous aussi, sans doute, avez-vous éprouvé ce malaise, plus ou moins confusément, ce qui ne vous a pas empêché de descendre dans la rue en toute conscience. Oui, vous aussi, vous avez sûrement pensé à l’expression « bal des hypocrites », peut-être même pire, en voyant le spectacle affligeant des récupérations. Ils pleurent des « amis » mais ils ne l’étaient pas. Ils pleurent mais crachaient sur Charb. Ils pleurent mais serrent la main à Netanyahou. Ils pleurent mais ne levaient pas le petit doigt pour sauver Charlie Hebdo du naufrage financier annoncé. Ils pleurent mais reçoivent Fifille-là-voilà à l’Élysée. Ils pleurent mais déroulent le tapis rouge à l’oligarchie financière. Ils pleurent sur nos libertés en danger mais préparent un Patriot Act bien poujado-zemmourien. « L’hypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu », disait La Rochefoucauld. Un jour – mais ce jour n’est-il pas arrivé ? – il nous faudra tenter de répondre à la question qui heurte de plein fouet tout ce que nous sommes et tout ce nous essayons de bâtir chaque jour : pourquoi en sommes-nous arrivés là ? En attendant, nous avons déjà une certitude, et celle-là se conjugue au futur : le peuple citoyen peut garder la main et maintenir tous les hypocrites sous sa surveillance. Il ne tient qu’à lui, qu’à nous. Oublions l’union nationale ; concentrons-nous sur l’union des citoyens. (http://www.humanite.fr/hypocrites-562888 )

Et quelques autres, que vous pourrez trouver sur ma page face book : https://www.facebook.com/bbordasilvand

13janvier2015_4857Il y a eu tout de même ce beau et lumineux moment, mardi dernier, ciel bleu, soleil, une heure dans mon coin de terrasse préféré avec un bouquin, des mots-croisés, et ma tisane de début d’après-midi aux senteurs indiennes… Mais je vais revenir bientôt à mes ailleurs et ici, je vous avais promis une autre couleur bretonne, elle viendra. En attendant, cette semaine qui débute sera Bisontine puis Caladoise. A bientôt !

PS : pour de bêtes raisons d’internet capricieux, cette page commencée le 16, ne paraît que ce 19 janvier… j’espère…